Partie 4 - Chapitre 7 -
Inspecteur Égala
Après avoir raccompagné Alicia, je
suis rentré chez moi avec une idée à creuser. La soirée avait été plus détendue
que je ne l'aurais imaginé. Ma femme n'avait pas son pareil pour mettre les
gens à l'aise. Notre invitée avait repris des forces et était rentrée avec le
sourire. Je savais qu'il cachait sa souffrance. Découvrir une famille autour
d'un bon repas était quelque chose qu'elle ne connaissait plus depuis bien trop
longtemps. Il était évident qu'elle ne pouvait pas être l'instigatrice de tous
les derniers événements. Elle, et son mari, en étaient les victimes. Or,
pouvoir aider faisait partie de mes prérogatives. Seulement, il me fallait
prendre du recul dans cette délicate affaire.
Étant donné qu'elle avait été
surprise de l'association "Tennant - Ophélie", il me fallait gratter
dans cette direction. J'ai donc décidé de sortir le "pédigrée" de
David Tennant. Par chance, il était le genre à aimer les gadgets dernier cri. Sa
voiture de sport était équipée d'un GPS destiné à la localiser en cas de vol. J'ai
donc rempli une demande pour obtenir les quinze jours précédant l'agression du
patron d'Alicia. Comme je n'aurais les informations que le lendemain, je suis
allé me coucher.
Le jour suivant, je suis arrivé
tranquille à mon bureau. Ce que j'avais demandé m'attendait. J'ai recoupé les
différents trajets du playboy avec les lieux des méfaits. J'y ai ajouté les
domiciles d'Alicia, d'Ophélie et de notre bon professeur. Si la voiture stationne
régulièrement non loin des deux premières, il ne va jamais vers le domicile du
professeur. Il passe, par contre, chaque jour à l'hôpital. Mais il n'y reste
jamais plus de quelques minutes. Il n'est donc pas possible qu'il soit celui
qui apparaît sur la vidéo. Sauf bien sûr, s'il se déplace à pied. Mais il ne le
fait quasiment jamais. Je rajoute le resto dans lequel travaille Alicia. Là
encore, il y passe régulièrement. Je ne sais pas ce qui m'a pris, j'ai ajouté
le domicile du directeur de l'hôpital. Il y a bien quelques passages brefs,
mais rien de probant. Par contre, je constate l'arrêt régulier à un endroit
récurent. Je fais une recherche sur l'endroit, il s'agit d'un hôtel. Je devrais
dire un centre hôtelier car il s'agit d'un regroupement de petits pavillons
individuels. Rien d'étonnant quand on connaît la réputation du lieu,
l'adultère. Ce qui me chiffonne, c'est la raison qu'un célibataire aurait de se
rendre là-bas. Quand on a un appart de grand standing, on n’a pas besoin d'aller
à l'hôtel. Il faut que je me rende sur place avec une photo.
À l'arrivée de ma partenaire, Katia
Labry, j'avais trouvé mon bonheur sur le réseau social de l'individu. J'ai pu remarquer
une forte propension à l'auto congratulation. Bon c'est vrai qu'il a remporté
un certains nombres de tournois dans son sport, mais tout de même. Il me donne
vraiment l'impression d'aimer sa petite personne. Kat me confirme avoir le même
sentiment. Nous nous mettons en route, elle prend le volant. Je lui explique
les grandes lignes de l'affaire. Comme elle ne dit rien, je comprends qu'elle
est dubitative. C'est un bon flic, avec beaucoup de discernement et un bon
"flair". Elle préfère voir dans l'agression du patron d'Alicia un
crime crapuleux. Quant à la vidéo peu probante de l'hôpital, elle penche plus
sur la théorie de la concurrence.
- OK Kat, admettons que tu es
raison. Explique moi pourquoi les caméras de surveillance du quartier du
restaurant sont toute en panne en même temps.
- Interférence du signal vidéo.
- On est d'accord, mais c'est
fort qu'une bande de dégénérés s'attaque au resto à ce moment précis, non ?
- Il n'y aurait pas eu
l'agression personne n'aurait remarqué la coupure.
- Soit, que fais-tu d'Alicia ? Elle
est liée aux deux affaires.
- Elle n'a pas de chance. La
guigne la suit depuis son accident.
- Pour un flic qui a la tête sur
les épaules, croire en une part de hasard persistant, c'est paradoxal.
Je crois que j'ai chagriné son
égo. Elle pince ses lèvres dans cette petite grimace qui me signale qu'elle se
retient de répondre.
- Vas-y, balance, on est des
adultes.
- Je pense que tu n'es plus
objectif en ce qui concerne cette femme.
- Tu insinues quoi là exactement
?
- Tu t'en veux de ne pas être
arrivé plus tôt sur les lieux de l'accident, ou de ne pas avoir été plus
présent pour cette malheureuse. J'en sais rien. Tu dois bien sentir que cette
affaire pue à des kilomètres mais tu pars dans des raisonnements loufoques.
- Parce que tu trouves loufoque
qu'un mec plein aux as tente de tuer le mari de la femme qu'il désire ?
- Mais tu n'as aucune preuve. Juste
un début de présomption parce qu'un célibataire plutôt beau gosse emmène ses
conquêtes dans un hôtel.
Le ton est tendu, comme sa
conduite depuis qu'on s'est mis à parler de manière plus direct. C'est un bon
flic, je me dois de retenir ses arguments. Du coup, je lui réponds :
- Si tu penses qu'on perd notre
temps, fais demi-tour.
En règle générale, quand je dis
ça, elle en profite pour s'exécuter. Pourtant, elle continue et prend la sortie
menant à l'hôtel.
- Maintenant qu'on est là, autant
aller jusqu'au bout. Tu verras par toi-même.
Les cinq minutes suivantes
s'écoulent dans un silence religieux. Je dissèque les paroles de ma partenaire.
Se pourrait-il que je me sois laissé mener par le bout du nez ? Je ne vois pas
ce qui pourrait troubler mon objectivité. Je suis arrivé le premier sur les lieux
de l'accident par un concours de circonstances. Je sais qu'on ne doit jamais
bouger un blessé. Sauf qu'en sa vie est en danger. Ce soir là, je n'avais pas
d'autre solution. Un court-circuit avait mis le feu au véhicule. J'ai dû
extraire Alicia puis son mari. Le chauffeur du poids lourd avait quitté son
camion à temps quand la voiture a explosé. Je me suis occupé des blessés, mais
je n'ai pas pu empêcher Éli de s'enfoncer dans le coma. Il a perdu connaissance
pendant que j'appelai les secours. C'est trop bête. Dire qu'il m'avait demandé
de commencer par m'occuper de sa femme. Si ça se trouve, je n'aurais pas pu l'empêcher
de plonger. C'est ce que m'ont dit les secours. Kat a raison, ça doit jouer sur
mon jugement.
- Écoute Kat, je me fie à toi. Mène
l'enquête et si rien ne te saute aux yeux, alors ça voudras dire que tu as
raison.
Elle me sourie en me confirmant
que je devrais savoir que les femmes ont toujours raisons.
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