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dimanche 13 juillet 2014

Partie 4 - Chapitre 11 - Alicia

Partie 4 - Chapitre 11 - Alicia.
Je me sens ridicule. Hier, je me suis énervée toute seule contre les insinuations de l'inspecteur. J'en ai perdu connaissance. Puis je me suis retrouvée dans sa famille. Si au départ, j'étais sur la défensive, le repas a été un bon moment. Ça m'a permis de décompresser. Quand il m'a raccompagné, nous n'avons abordé que des banalités. Sa chance d'avoir une famille, un havre de paix qui lui permette de souffler de sa vie trépidante. Je n'ai pas su décrypter son sourire quand il m'a déposé. Et maintenant, après une nuit étonnamment calme, je suis un peu décontenancée. Éli et moi avons toujours voulu avoir des enfants. Ma stérilité a été un cauchemar. Mais nous y avons fait face ensemble. Nous étions présents pour les naissances dans la famille et chez les amis. Ça nous mettait du baume au cœur d'être les "tonton et tata". Puis il y a eut l'accident. La solitude a pris la place de la gaieté. Peut être me suis-je aigrie. Au fond de moi, je comprends qu'il ne soit pas facile d'expliquer à des enfants que leur oncle ne peut plus venir les voir. Et si j'ai essayé de ne pas rompre les liens, j'ai vite ressentie la gêne que ma présence engendrait. Les enfants sont devenues de jeunes adolescents. Ils ont grandit en nous oubliant. Hier, j'ai eu du plaisir à voir cette famille, mais aussi une grande tristesse. On ne cesse toujours de se convaincre que si les rôles étaient inversés, nous aurions réagit différemment. Peut-on en être sûr ? Aucunement.
C'est avec cette mélancolie dans le cœur que j'ai été au rendez-vous avec le professeur Stauros. Il avait l'air tout excité. Contrarié même. Il m'a invité à aller boire un café comme s'il voulait me tenir à l'écart de l'hôpital. Son discours sur la part féminine d'Éli, bien que cohérent, m'a laissé sur ma faim. Je n'ai jamais fait d'étude de psychologie du comportement. Du coup, je n'ai pas compris grand chose. Hormis que la fée censée me représenter, n'est pas ce qu'il escomptait. Quand il a reçu le sms qui le rappelait à son bureau, je suis restée, plongée dans un chaos sentimental. Le bar dans lequel nous étions étant à proximité, il est reparti en trombe. En proie à toutes sortes de raisonnement et de questions, j'ai commandé un deuxième café. Tandis que j'attendais ce dernier, j'ai aperçu Ophélie sortir de l'hôpital. Elle était visiblement en colère. Elle parlait à quelqu'un au téléphone. Au bout de deux minutes après qu'elle ait raccroché, un coupé sport que je ne connais que trop bien est arrivé. Elle s'y est engouffrée. J'ai immédiatement payé l'addition et me suis précipitée à la voiture.
La chance semble être avec moi. La voiture de David est arrêtée à un feu rouge, ce qui me permet de démarrer et de me glisser dans la circulation. Bien que quelques voitures nous séparent, je peux voir les deux occupants en train de se disputer. Je m’évertue à les suivre à distance, espérant ne pas être repérée. Au bout de dix minutes de filature, je me retrouve dans un quartier résidentiel assez huppé. David et Ophélie descendent pour entrer dans un immeuble de standing. J’attends quelques minutes puis je descends. Je m’approche de la porte vitrée. Les boites aux lettres n’est accessible qu'en franchissant l'entrée. Impossible de le faire sans éveiller l'attention du vigile en faction derrière son comptoir. Je regarde autour de moi, dans la rue. C'est à lors que l'idée me viens. Je prends les publicités des boites aux lettres environnantes puis, m'armant de courage, j’entre.
- Bonjour Monsieur, je viens distribuer les dernières publicités.
L'homme d'une cinquantaine d'année m'a regardé de pied en cape et m'a fait signe de m'activer. J'ai commencé à mettre les publicités dans les boites tout en lisant les noms. J'ai fini par trouver celui d'Ophélie. Soudain, l'ascenseur s'est mis en branle. Il me restait encore quelques boites à faire. Seulement j'avais peur de me retrouver face au couple. J'ai fourré ce qui me restait dans la première boite à proximité et je suis partie. Je n'ai même pas salué le gardien dans ma hâte.
Revenue à ma voiture, je me suis enfoncée dans mon siège. David monte dans sa voiture et démarre en trombe. Ou va-t-il précipitamment ? Je m'efforce de ne pas le perdre tout en restant à bonne distance. Comme par hasard, mon téléphone sonne. Je regarde brièvement la photo qui s’affiche, c’est David ! M’a-t-il repéré ? Non, je ne pense pas, il s’arrêterait sur le côté si c’était le cas. Que me veut-il ? Si je décroche, il va entendre que je suis au volant. Je choisis donc de laisser sonner. Le signal de messagerie retentit, il me laisse un message. Il s’engage sur la voie rapide, je ne pourrais pas le suivre s’il décide d’appuyer sur le champignon. Je le laisse filer pour m’arrêter sur la première place de stationnement. J’écoute ma boite vocale :
- Salut Ali, je me disais que ça faisait un moment que je n’étais pas aller voir Éli. J’ai l’intention d’y aller, je passe te prendre ok ? A tout de suite.
Calamité ! Il se dirige tout droit chez moi. Tant pis pour lui, il verra bien que je ne suis pas là. Par contre, il compte aller à l’hôpital. Je peux y être avant lui. Je n’aurais qu’à éteindre mon portable et faire style de découvrir sa venue.
Alors que je mets mon clignotant pour repartir, mon portable sonne une fois encore. Cette fois, c’est l’inspecteur Egala qui m’appelle. Je décroche.
- Bonjour inspecteur, comment allez-vous ?
- J’ai connu des jours meilleurs. J’aimerais m’entretenir à nouveau avec vous. Peut-on se rencontrer ?
- Je vais voir mon mari ce matin, vous pouvez m’y rejoindre si vous voulez.
- Entendu, ma collègue sera avec moi.
- Pas de problème, à tout à l’heure.
Il a la voix d’un prédateur. Qu’est-ce que ça veut dire ?
Je vais le plus vite possible dans la mesure où la circulation est assez dense aujourd’hui. Je ne suis pas encore arrivée que je reçois un nouvel appel de David. Il doit avoir constaté mon absence. Ce qui veut dire qu’il va direct à l’hôpital. Ça va se jouer à peu de chose. Instinctivement, j’enfonce la pédale d’accélérateur. Il ne faudrait pas que j’arrive après lui.


1 commentaire:

  1. Houlà, l'étau semble se resserrer! Une machination serait-elle en marche?

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